PubGazetteHaiti202005

Editorial: - Canal/rivière massacre: Ariel  Henry a fait oeuvre qui vaille à l'ONU

Ariel Henry, premier ministre

Depuis la crise diplomatique entre Haïti et la République dominicaine née de la décision d’un groupe de citoyens haïtiens de Ouanaminthe de construire un canal sur la rivière massacre, Ariel Henry n’avait fait aucune déclaration publique. 

Alors que le président dominicain Luis Abinader, après avoir annoncé la fermeture des frontières avec notre pays, avait précédemment profité de son discours à l’assemblée générale des Nations Unies pour dénoncer ce qu’il considère comme une action « illégale », Ariel Henry avait vendredi 22 septembre 2023 rendez-vous avec l’histoire. Il avait deux choix: trahir la patrie ou défendre les intérêts et la souveraineté du pays pour lequel nos ancêtres se sont battus.  
A la tribune de l’ONU, le premier ministre a pris ses responsabilités et transmis à l’assemblée le message du peuple haïtien, dont le soudain réveil patriotique étonne :

« Haïti réaffirme son droit souverain du peuple haïtien d’utiliser les ressources hydriques binationales, comme le fait la République Dominicaine et revendique une répartition équitable des eaux de cette rivière », a lancé le premier ministre. Comme pour dire: « Kanal La Pap Kanpe » ( KPK), le slogan de ralliement, en vogue actuellement. 

Ariel Henry, décrié dans l’opinion à cause de la situation catastrophique du pays depuis son arrivée au pouvoir, a marqué un point décisif au moment où la nation a besoin des dirigeants à la hauteur de leurs tâches. Il faut le lui reconnaître. 
Le premier ministre d’un ton calme et serein dans un contexte aussi particulier et tendu a dignement fait valoir notre droit sur cette rivière partagée par les deux États, en rappelant à l’autre partie les mécanismes déjà établis en cas de litige.

«  Le peuple haïtien choisit la voie du dialogue et de la négociation pour régler pacifiquement le différend, dans le respect des instruments juridiques internationaux déjà signés de bonne foi entre les deux Etats, en 1929 et 2021 », a déclaré Ariel Henry, une manière diplomatique de dénoncer l’attitude guerrière du président Abinader ayant mobilisé des troupes près de la frontière, qu’il a d’ailleurs fermée depuis le 14 septembre 2023 « jusqu’à l’arrêt des travaux de construction du canal ». Une menace qui n’a pas l’air d’ébranler le gouvernement car selon certains médias, l’Etat haïtien aurait déjà envoyé sur place des équipements pour la poursuite du projet. 

Après le silence du gouvernement et les informations faisant croire qu’a travers un document le ministère de l’agriculture serait d’accord avec la position dominicaine sur la construction du canal, le pays attendait l’intervention du premier ministre à la 78e session ordinaire de l’assemblée générale de l’ONU. Et il n’a pas dérogé à son devoir. Son discours dont l’essence repose sur le destin commun des deux peuples « appelés à vivre, à progresser ensemble »,  « la possibilité de partager équitablement des ressources communes, sans heurts et dans le respect mutuel » et le rappel du droit entier de l’Etat haïtien de les exploiter, mérite d’être salué. 

Maintenant, de la parole Ariel Henry doit passer aux actes. Il devrait penser à se rendre dans les meilleurs délais sur le chantier comme pour engager l'état dans ce projet. Après son discours à l'ONU, le premier ministre Henry devrait être le bienvenu à Ouanaminthe. Il a fait oeuvre qui vaille. En plus de cela, le gouvernement doit nous informer des décisions qui vont être prises pour faire face aux conséquences nefastes résultant de la fermeture des frontières par la République dominicaine. 

D'un autre côté, Ariel Henry doit  profiter de ce brin de soutien ou de sympathie conjoncturel dont il bénéficie actuellement pour sortir par la grande porte en engageant un vrai dialogue avec les autres protagonistes afin de résoudre la crise politique une fois pour toutes. Cela permettrait de déboucher sur l’installation d’un gouvernement d’union nationale qui s’attaquera particulièrement au phénomène de l’insécurité provoquée par les gangs armés et l’établissement d’un nouveau conseil électoral provisoire (CEP) en vue de placer à la tête de l’Etat, dans un délai raisonnable, des autorités élues démocratiquement capables de mettre le pays sur la voie du progrès. Des autorités qui sauront mettre à profit ce réveil citoyen pour notre autosuffisance alimentaire, la véritable crainte expliquant, semble-t-il, le comportement agressif du gouvernement dominicain face à notre pays. 

 

 


Par: Volcy Assad

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